La Russie s’escrime à protéger le rouble face aux assauts de la crise

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Un courtier de la Bourse de Moscou, le 9 octobre 2008 (Photo : Alexey Sazonov)

[28/11/2008 16:15:16] MOSCOU (AFP) La Russie, confrontée à sa pire crise financière depuis dix ans, a renforcé vendredi l’arsenal de sa Banque centrale pour mieux combattre fuites de capitaux et inflation, et empêcher la chute du rouble de dévorer toutes ses réserves.

La Banque centrale russe (BCR) a annoncé vendredi un abrupt relèvement d’un point de son taux de refinancement, à 13%. Une mesure identique avait été prise le 11 novembre.

De quoi selon elle “abaisser le niveau des sorties de capitaux de Russie et contenir les tendances inflationnistes”. La Russie, longtemps épargnée par la crise financière, a vu sa Bourse s’effondrer à un quart de sa valeur du printemps et les entrées de capitaux s’arrêter brusquement, alors que son économie en est extrêmement dépendante.

La Banque centrale a par ailleurs, pour la troisième fois en trois semaines, laissé le rouble se dévaluer légèrement, en élargissant une nouvelle fois le “corridor” dans lequel elle entend voir le rouble fluctuer face au panier dollar-euro qui lui sert de référence.

Selon les analystes, la BCR aurait ainsi abandonné le seuil de 31 roubles pour adopter celui de 31,3 roubles, ce qui correspond de fait à une dévaluation d’autant, étant données les fortes pressions que subit actuellement le rouble.

Toutes ces mesures simultanées visent à sortir la Banque centrale de la position inconfortable dans laquelle elle s’est trouvée coincée ces dernières semaines, et qui lui a déjà coûté des dizaines de milliards de dollars en réserves.

La BCR a été contrainte d’intervenir régulièrement et massivement pour empêcher la devise russe de s’effondrer, ce qui lui a coûté plus de 57 milliards sur les seuls mois de septembre et octobre.

Le rouble est sous forte pression depuis la guerre contre la Géorgie début août et la situation n’a fait qu’empirer avec la crise financière en raison de la dégringolade des cours du pétrole et des énormes fuites de capitaux qu’elle a provoquées.

Ses réserves de devises, troisièmes du monde derrière celles de la Chine et du Japon et fierté du pays, ont fondu de près de 150 milliards de dollars depuis leur pic du mois d’août. Elles s’élevaient la semaine dernière à 450 milliards USD.

En relevant ses taux, la BCR entend également protéger la monnaie: une telle mesure doit rendre les dépôts bancaires plus rémunérateurs et ainsi dissuader particuliers et entreprises de retirer leurs roubles des banques pour les changer en dollars ou en euros.

Mais de l’avis général, un affaiblissement du rouble reste inévitable. “On peut s’attendre à une nouvelle dévaluation du rouble”, préviennent les analystes de la banque Commerzbank dans une note vendredi.

“Les perspectives du rouble sont devenues un objet d’inquiétude nationale. La devise s’est appréciée de façon constante pendant cinq ans, mais a fait demi-tour en juillet. Elle a depuis reperdu presque tous ses gains”, souligne le stratégiste James Beadle, de Pilgrim Asset Management, dans une tribune de presse parue vendredi.

Selon lui, la réponse du gouvernement à cette situation, initialement “confuse”, s’est améliorée, adoptant une ligne selon laquelle “le rouble va se dévaluer de manière modérée”. “Si nous parvenons à éviter une dépression mondiale, une dévaluation progressive et contrôlée est très probable”, juge-t-il.