Primeurs 2005 : les prix des grands crus de Bordeaux s’envolent

 
 
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Des amateurs de vin participent, le 6 mai 2006 à Bordeaux, à une grande dégustation de grands crus des châteaux du Bordelais. (Photo : Michel Gangne)

[27/06/2006 07:09:24] BORDEAUX (AFP) Les prix des grands crus les plus prestigieux de Bordeaux, vendus en primeurs, ont enregistré des hausses spectaculaires, provoquées par une demande mondiale de la part de spéculateurs et d’amateurs de luxe du millésime 2005, qualifié unanimement d’exceptionnel.

“A ce jour, la hausse par rapport à 2004 sur quelque 400 crus commercialisés sur le marché des primeurs atteint 65%”, a indiqué Laurent Ehrmann, directeur de la société de négoce Barrière-Frères en précisant toutefois qu’elle n’atteint que 25% par rapport à 2000, le dernier millésime de très grande qualité.

La hausse a atteint 300% et des prix pouvant aller jusqu’à 400, voire 600 euros la bouteille pour une poignée de “happy fews”, indique une autre source du milieu viticole sous couvert de l’anonymat.

“Il ne faut pas se leurrer, il s’agit d’une hausse exceptionnelle pour un millésime exceptionnel, ne concernant que quelques châteaux exceptionnels”, indique Max de Lestapis, président national du syndicat des courtiers en vins et spiritueux, l’expliquant notamment par des rendements faibles alliés à une très grande qualité, “la rareté et la forte demande faisant le prix”.

Cette envolée vertigineuse des prix, qui viennent d’être communiqués aux courtiers et négociants, ne “concerne qu’un petit aspect des vins de Bordeaux, important en terme d’image mais négligeable en terme de quantité”, insiste Francis Cruse, directeur du syndicat des négociants de Bordeaux.

“Pour le reste” de la viticulture bordelaise les “prix sont au ras des pâquerettes”, souligne M. Cruse ajoutant que ces vins vendus en primeurs ne représentent que 3 à 5% en volume des vins de Bordeaux alors que de très nombreux viticulteurs sont plongés dans une profonde crise due à la surproduction et une féroce concurrence mondiale.

La pratique de la vente en primeur permet d’acheter le vin avant sa sortie sur le marché, après une semaine de dégustation organisée quelques mois après les vendanges, ce qui permet une acquisition à un prix plus bas et la certitude d’accéder aux vins les plus recherchés.

Dans le très discret milieu des courtiers bordelais, intermédiaires entre les châteaux et le négoce, on admet que l’ampleur de la hausse “dépasse l’imagination”, notamment pour le club des cinq premiers crus du Médoc que sont Lafite-Rothschild, Latour, Margaux, Mouton Rothschild et Haut-Brion ou encore les premiers grands crus classés de Saint-Emilion comme Ausone.

“Le gros de la campagne s’est fait avec des hausses de 15 à 30%. Quand on est arrivé sur les crus les plus prestigieux, les prix ont explosé, il y a eu un emballement”, a indiqué un courtier.

Pour Emeric Sauty de Chalon, président de la société “1855” de vente de grands crus par internet, le 2005, qu’il qualifie d'”anthologique”, est un “millésime de rupture”, les prix atteignant des “records historiques” dus à une forte demande mondiale, notamment de la part de nouveaux marchés comme la Russie, la Chine, l’Amérique du sud ou l’Inde.

Selon Philippe Dambrine, président du conseil des vins du Médoc, l’achat de ce millésime 2005 par des spéculateurs et les “nouveaux riches” des quatre coins de la planète ont fait prendre à quelques grands noms une “valeur d’oeuvre d’art”.

“Il y a toujours eu un fossé”, entre les prix des grands crus et le reste des vins de l’appellation d’origine contrôlée Bordeaux “mais là, c’est un estuaire”, déplore Jean-Louis Nadau, viticulteur et responsable viticole de la FDSEA qui n’a pas pu se verser de salaire depuis deux mois.

 27/06/2006 07:09:24 – © 2006 AFP