Pétrole : accord intérimaire entre le Tchad et la Banque mondiale

Par : Autres

 

Pétrole: accord intérimaire
entre le Tchad et la Banque mondiale

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Le sous-secrétaire
d’Etat américain adjoint aux Affaires africaines, Donald Yamamoto, le
24 avril 2006 à N’Djamena

Le Tchad a signé avec la Banque mondiale un
armistice qui suspend leur conflit sur l’utilisation des revenus pétroliers
tchadiens et va permettre à l’institution internationale de reprendre
partiellement ses financements en faveur de N’Djamena.

 

Après plusieurs jours d’intenses tractations à
Washington avec le ministre tchadien des Finances Abbas Mahamat Tolli, la
Banque mondiale (BM) a annoncé jeudi que les deux parties étaient parvenues
à un “accord intérimaire” sur le différend qui les oppose depuis trois mois,
même si, a-t-elle immédiatement précisé, “un accord global et définitif
reste à conclure”.

 

Selon cet accord, le Tchad s’est engagé à
adopter avant la fin de l’année une loi budgétaire “spécifiant que 70% des
revenus pétroliers seront utilisés pour des programmes prioritaires de lutte
contre la pauvreté”. “Les dépenses consacrées à la sécurité sont exclues de
cette enveloppe, et seront financées sur les revenus généraux du Trésor
tchadien”, précise la BM.

 

Sitôt cette loi votée, la Banque “déboursera
chaque mois au cours du prochain trimestre un tiers des sommes totales en
dépôt” sur le compte bancaire qu’elle a bloqué en janvier, “étant entendu
que cette période servira à élaborer un accord global” sur la question.

 

Selon les autorités de N’Djamena, environ 100
millions de pétrodollars tchadiens sont gelés sur un compte londonien de la
Citibank ou retenus par le consortium pétrolier américano-malaisien qui
exploite le brut des champs de Doba, au sud du Tchad.

 

Pour saluer cet accord “intérimaire”, la BM a
décidé de reprendre le versement d’une partie des 124 millions de dollars de
crédits au Tchad qu’elle avait suspendus au début de la crise, pour des
projets en matière “d’éducation, de santé, de développement communautaire,
de lutte contre le sida, d’agriculture, d’électricité, d’eau et
d’infrastructures”.

 

Le compromis annoncé jeudi vient mettre un
terme à la grave crise ouverte en décembre par la décision du Tchad
d’amender unilatéralement sa loi sur la gestion des revenus pétroliers,
imposée par la Banque mondiale en échange du financement d’un oléoduc de
plus de 1.000 km entre les puits de Doba et le port camerounais de Kribi.

 

Présenté comme un modèle de bonne gouvernance,
ce texte bloquait 10% des revenus de l’or noir sur un fonds destiné aux
générations futures et imposait au Tchad, moyennant contrôle, d’affecter 85%
des sommes restantes à des projets de réduction de la pauvreté.

 

Mais, deux ans seulement après avoir extrait
son premier baril, le régime tchadien, confronté à une grave crise
financière et menacé par des mouvements rebelles, a fait voler ce texte en
éclats, notamment, comme le président Idriss Deby Itno l’a récemment admis,
pour acheter des armes.

 

Sitôt la révision de la loi votée fin décembre,
la Banque mondiale a riposté en suspendant ses crédits et en gelant les
pétrodollars tchadiens. Et malgré des navettes incessantes entre N’Djamena
et Washington, le conflit est resté en l’état jusqu’à l’offensive avortée
des rebelles tchadiens du Front uni pour le changement (Fuc) le 13 avril sur
N’Djamena.

 

Désespérément à court d’argent, le Tchad a
menacé dès le lendemain de couper son robinet de brut (200.000 barils par
jour) s’il ne récupérait pas avant le 18 avril ses pétrodollars bloqués à
Londres.

 

Les intérêts de leurs “majors” directement
menacés, les Etats-Unis ont alors proposé leur médiation, acceptée par le
Tchad qui a retardé son ultimatum à la fin du mois d’avril.

 

Plusieurs jours de discussions à N’Djamena
entre l’émissaire américain Donald Yamamoto et les autorités, et à
Washington entre le ministre Abbas Mahamat Tolli et les responsables de la
BM, ont finalement permis de trouver un terrain d’entente, même provisoire.

 

 

 

© AFP 2006

Photo : Martin Van der Belen