Phoques : l’OMC rejette l’appel du Canada et de la Norvège contre l’embargo de l’UE 

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Un phoque (Photo : Pablo Porciuncula)

[22/05/2014 15:54:05] Genève (AFP) L’OMC a donné tort jeudi en appel au Canada et à la Norvège, qui s’élevaient contre un embargo de l’Union Européenne sur les produits dérivés du phoque.

L’Organisation mondiale du commerce, saisie contre cet embargo instauré en 2010, avait déjà donné tort aux deux pays en novembre 2013. L’UE avait justifié son embargo par les “préoccupations morales du public” jugeant les méthodes de chasse “cruelles”.

Après une audition en mars dernier, l’organe d’appel de l’OMC, composé d’experts en matière de commerce, a réitéré jeudi à Genève la décision de l’organisation en mettant en avant pour la première fois, pour cette instance, la question du bien-être des animaux conjuguée avec les impératifs du commerce.

“L’organe d’appel a confirmé les conclusions du groupe d’experts (ndlr premier jugement) selon lesquelles ce régime d’interdiction lié aux phoques est nécessaire pour protéger les préoccupations morales”, indique le rapport de décision, constitué de plus de 200 pages. Cette décision est désormais finale.

L’UE met en cause l’usage de gourdins en bois avec un bout métallique, le hakapik, utilisés pour assommer les phoques avant de les tuer.

Venue à Genève en mars pour plaider devant l’OMC la cause de son pays, la ministre canadienne de l’environnement, Mme Leonoa Aglukkaq, a assuré que la chasse aux phoques était pratiquée dans son pays depuis “des siècles” et de “manière humaine et durable”.

“Nous avons été victimes de campagnes de désinformation et de mensonges menées par des groupes d’activistes”, qui “font de l’argent en collectant des fonds, à l’occasion de campagnes récurrentes sur les bébés-phoques”.”Nous ne tuons pas les bébé-phoques”, avait martelé la ministre.

Du fait de l’embargo européen, les populations de phoques ont beaucoup augmenté au Canada, ce qui met en péril les ressources en poissons de la mer, a-t-elle encore indiqué.

Pour elle, l’OMC devrait statuer en fonction des règles internationales du commerce et non pas en fonction de la moralité, une notion éminemment subjective.

L’embargo de l’UE fait des exceptions pour les produits de la chasse des peuples indigénes, au Canada les Inuites et les Inuvialuit, les Kalaallit du Groenland, ainsi que pour les Inupiat et les Yupik de l’Alaska américains et les Yupik de Russie.

Le Canada et la Norvège attaquaient cette exception comme une discrimination entre chasseurs indigènes et non indigènes, l’OMC a refusé de se prononcer sur ce point.

Ils dénonçaient aussi l’autorisation de vente des produits issus des chasses menées par la Suède, la Finlande et l’Estonie au titre de leur programme de régulation de leurs ressources marines. L’OMC sur ce point a estimé qu’il y avait violation des régles commerciales, mais a noté que ces dernières exceptions étaient en cours de réforme par l’Union Européenne.

Au Canada, environ 6.000 personnes pratiquent la chasse commerciale du phoque, principalement à Terre-Neuve. Ce type de chasse connaît depuis quelques années de grandes difficultés, en raison de l’absence de glace et de l’effondrement du prix des peaux de phoque.

Selon Ottawa, la population des phoques du Groenland, principale espèce chassée, a triplé depuis les années 1970, à environ 7,3 millions d’animaux.

La population des phoques gris a quant à elle été multipliée par 80 depuis les années 60 et s’affiche à 400.000.

L’embargo de l’UE ne concerne pas l’usage des peaux de phoques par l’industrie de la mode, à condition que les produits réalisés soient réexportés, les marchés les plus importants étant la Chine et la Russie.