En étant l’un des premiers chefs d’Etat étrangers à féliciter le président français nouvellement élu, le locataire du Palais de Carthage donne l’impression de vouloir rattraper l’occasion perdue lorsqu’il n’avait pas reçu le –plus que probable- futur candidat à la présidence de la République française.

Le président Béji Caïd Essebsi a adressé, à son homologue français nouvellement élu, Emmanuel Macron, un message de félicitation, d’une rapidité remarquable. S’il n’a pas été le premier, il a été dans la première vague des chefs d’Etat, qui, dès dimanche 7 mai 2017, peu de temps après la proclamation des résultats de l’élection française la plus importante de l’histoire française, de par son impact politique sur le plan interne et à l’échelle de l’Union européenne –le partenaire politique, économique et commercial le plus important de la Tunisie-, ont sacrifié à ce rituel.

La rapidité du geste de BCE tranche avec son attitude lors de la visite de celui qui était alors le plus que probable candidat à l’Elysée. Lorsque M. Macron est arrivé début novembre 2016 en Tunisie pour y passer deux jours, tout le monde s’attendait à ce qu’il soit, comme il l’a été dans tous les pays qu’il a visités –en Algérie, il l’a été par le chef du gouvernement, à défaut du président Bouteflika qui, en raison de l’Etat de sa santé, ne reçoit plus tellement de visiteurs- par le chef de l’Etat ou, à défaut, par celui du gouvernement. Il ne l’a finalement été ni par l’un ni par l’autre. Pourtant, le bon sens politique, et peut-être aussi un peu de flair et une dose de calcul, commandaient que l’un ou l’autre s’acquitte de cette tâche. Car si M. Macron ne faisait pas encore figure de favori de l’élection présidentielle à venir, il était clair qu’il allait, en raison de la fraîcheur et du renouveau que sa future candidature annonçait, en être l’un des principaux protagonistes. Et, à coup sûr, celui de la vie politique française au cours des années à venir.

Donc, ne pas recevoir Emmanuel Macron a constitué un sacré loupé de la part des plus hauts dirigeants tunisiens, et plus particulièrement du président Caïd Essebsi qui se considère –et que beaucoup considéraient comme tel- comme un fin politique, tant sur le plan interne qu’en matière de relations internationales.

Certes, l’un de nos confrères, proche du «Palais», Leaders en l’occurrence, a tenté d’en faire porter la responsabilité au nouveau président de la République française et à son entourage en leur faisant dire que «La date du voyage ayant été précipitée, et s’agissant en plus d’un week-end, on ne pouvait pas solliciter un rendez-vous». Ce n’est pas la lecture qu’ont retenue d’autres médias.

Sous le titre «Emmanuel Macron met Béji Caïd Essebsi dans l’embarras, on pouvait lire en novembre sur le site du magazine Jeune Afrique que le futur candidat «avait émis le souhait d’obtenir une audience à la présidence de la République mais que, embarrassé, Béji Caïd Essebsi a préféré décliner pour ménager la susceptibilité de son homologue, François Hollande».

JA rappelle aussi que «Macron a donc été diplomatiquement redirigé vers un autre Caïd Essebsi, son fils Hafedh, le directeur exécutif du parti présidentiel Nidaa Tounes, qui s’est empressé de le recevoir dans un lieu insolite, le salon d’honneur de l’aéroport Tunis-Carthage».

Donc, BCE a raté le coche. Et puis, peut-on imaginer un seul instant le nouveau chef de l’Etat français, qui ne fait rien comme les autres, donner à pense ou, encore plus, dire qu’il tient rigueur à son homologue tunisien de l’avoir snobé il y a six mois? Bien sûr que non. Le politicien habile qu’il a démontré être retiendrait plutôt la volonté de son homologue tunisien de rattraper l’occasion perdue.