Le Monde en 2050  : La trajectoire ascendante des sept pays émergents

Par : Autres

La prospective est une discipline qui n’a rien d’une science exacte, surtout lorsqu’il s’agit d’étudier les tendances lourdes de l’économie. Néanmoins, les indications qu’elle peut donner et les tendances qu’elle peut esquisser sont toujours très utiles. Cela permet d’élaborer des politiques selon les scénarios jugés parmi les plus probables et alimente la réflexion de celles et ceux qui ignorent quelle place occupera leur pays dans le concert mondial et comment il se positionnera par rapport à ses concurrents.

Bref, les projections effectuées sont fondées sur une hypothèse plutôt optimiste, à savoir que tout ira bien, que les gouvernements et les décideurs feront ce qu’il faut faire.

À l’évidence, il existe plusieurs raisons pour lesquelles les choses pourraient ne pas se passer comme cela avait été imaginé par l’étude. Mais au-delà des aspects méthodologiques et des hypothèses qui la sous-tendent, cette étude apporte des éléments d’éclairage sur les tendances très lourdes qui marqueront le futur de notre monde et nous pousse à réfléchir sur le positionnement de l’économie mondiale.

A ce titre, la dissémination des principaux résultats de cette recherche auprès du public tunisien pourrait apporter des éléments au débat sur le devenir de notre pays dans un monde en pleine mutation.

Basculement de l’économie mondiale

Dans une étude récente, le cabinet PwC (Price Waterhouse Consulting) a dressé le possible panorama qui pourrait exister en 2050. L’économie mondiale pourrait plus que doubler de taille d’ici 2050, en supposant que des politiques favorisant la croissance soient mises en œuvre et qu’aucune catastrophe majeure ne menace la civilisation.

Sans surprise, on y apprend que le recentrage du monde va se poursuivre avec un poids de plus en plus important des pays émergents.

Les marchés émergents continueront d’être le moteur de croissance de l’économie mondiale. La Chine pourrait être la plus grande économie du monde, représentant environ 20% du PIB mondial en 2050; l’Inde occupera la deuxième place, alors que l’Indonésie se hissera à quatrième position.

Les économies des E7 (Chine, Inde, Brésil, Indonésie, Mexique, Russie et Turquie) pourraient augmenter sensiblement leur part dans le PIB mondial, passant de 35% actuellement à près de 50%. Dans le même temps, le G7 -qui regroupe aujourd’hui les plus grandes nations industrialisées (Etats-Unis d’Amérique, Canada, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie et Japon)- ne représentera que 20% de ce PIB.

La part de l’UE27 dans le PIB mondial pourrait descendre à moins de 10% d’ici à 2050, soit moins que la part de l’Inde.

L’étude permet aussi de prendre conscience de la possible émergence de pays qui ne sont pas toujours identifiés comme étant de futurs champions. Plus personne n’est étonné de la présence de la Chine dans ces classements d’excellence future mais celle de l’Indonésie ou même de la Turquie peuvent interpeller.

Cela vaut aussi pour d’autres pays comme le Vietnam et le Bangladesh qui devraient, selon PwC, rejoindre l’Inde dans le club des pays à forte croissance (5% en moyenne de 2016 à 2050). Figurent aussi dans les prévisions du cabinet l’Egypte, le Nigeria ou les Philippines.

Dans tous les cas cités, on relève que la démographie est un facteur incontournable. Nombre des pays appelés à jouer un rôle économique important au cours des futures décennies s’approchent ou ont déjà dépassé la barre symbolique des 100 millions d’habitants. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que la Russie concentre actuellement ses efforts pour enrayer son déclin démographique afin de ne pas perdre son rang.

Les économies avancées d’aujourd’hui continueront d’avoir des revenus moyens plus élevés, mais les économies émergentes devraient faire de bons progrès pour combler cet écart d’ici 2050. Cela ouvrira de nouvelles opportunités pour les entreprises qui seront plus disposées à faire des investissements à long terme sur ces marchés. Mais cela exigera de la patience pour faire sortir de la zone de turbulences actuelle des économies comme le Brésil, le Nigeria et la Turquie, dont le potentiel économique à long terme reste considérable à partir de cette analyse.

Mais pour réaliser ce potentiel de croissance, les gouvernements des pays émergents doivent mettre en œuvre des réformes structurelles, améliorer la stabilité macroéconomique et diversifier leurs économies afin de les rendre moins dépendantes des ressources naturelles et de développer des institutions politiques et juridiques plus efficaces.

Au Japon, pays emblématique des défis posés par le vieillissement de la population, la question démographique est à la convergence de plusieurs débats nationaux (emploi des femmes, politique migratoire).

Des handicaps non négligeables

Bien entendu, il faut se garder de penser que l’histoire est déjà écrite. Nombre des pays mentionnés ont des fragilités importantes. L’instabilité politique, la pauvreté de leurs infrastructures ou la mauvaise qualité de leurs systèmes éducatifs sont autant de handicaps sur la route du progrès.

A cela s’ajoute un autre risque que la prospective n’a que très peu pris en compte au cours des années passées. Il s’agit des dégâts écologiques provoqués par des croissances importantes, sans oublier les effets négatifs du réchauffement climatique et de l’absence de mesures pour s’y adapter.


Le rôle clé des acteurs publics et institutions dans un monde incertain

De nombreux défis attendent les institutions publiques et les acteurs étatiques, afin de soutenir la croissance mondiale dans les 30 prochaines années:

  • leur capacité à construire un écosystème attirant les investissements, les entreprises et les talents, mais aussi à générer une croissance inclusive face à de fortes menaces d’inégalités sociales,
  • leurs choix stratégiques en matière d’éducation et de formation permettront de développer une population active dynamique, dans un contexte de vieillissement de la population,
  • les institutions auront à réformer leur socle réglementaire, afin de renforcer la stabilité d’un environnement marqué par la volatilité et l’incertitude,
  • enfin, les mesures prises pour contrôler le changement climatique seront la clé pour soutenir une croissance durable.

Même si le chemin qui sépare la Tunisie de la liste des pays émergents est encore très long, les détenteurs de pouvoir et les acteurs actuels et futurs sont d’ores et déjà confrontés aux mêmes défis énumérés ci-dessus.

SBz

Node Tunisie – Millenium Project

Key findings