Etats-Unis : la santé va creuser le déficit public à long terme

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ès américain le 5 février 2013 à Washington (Photo : Chip Somodevilla)

[17/09/2013 18:19:44] Washington (AFP) Le déficit public américain va poursuivre pendant encore quelques années son spectaculaire recul, mais à moins de réformes structurelles ambitieuses, la croissance des dépenses de santé et le vieillissement de la population feront ensuite repartir la dette à la hausse.

La relative surprise du rapport annuel publié mardi par le Bureau du budget du Congrès américain (CBO), une agence indépendante, tient à la croissance moins forte que prévue des dépenses de santé. Il y a un an, en juin 2012, le CBO prédisait que les dépenses publiques pour la santé des handicapés, des plus démunis (programme Medicaid) et des plus de 65 ans (Medicare) atteindraient 8,6% du produit intérieur brut (PIB) en 2037. Il a aujourd’hui révisé cette estimation à la baisse, à 8% en 2038, contre 4,6% cette année.

Mais historiquement, jamais les dépenses publiques de santé n’avaient été aussi lourdes: en 1985, elles ne représentaient que 1,8% du PIB. Combinée aux baisses d’impôts inscrites dans la loi début 2013, et à la création d’un nouveau programme pour les personnes sans assurance, la croissance du coût de la santé contribuera à faire déraper les finances publiques à long terme.

“La conclusion reste identique à celle de l’année dernière: le budget fédéral est sur une trajectoire qui ne pourra pas être maintenue durablement”, a expliqué Doug Elmendorf, directeur du CBO, lors d’une conférence de presse.

“En tant que société, nous avons un choix fondamental à faire: réduire les dépenses de ces programmes, ou augmenter les impôts pour les financer, et jusqu’à présent nous n’avons fait que très peu l’un ou l’autre”, a-t-il dit.

A court terme, les voyants restent au “vert”. Le déficit public américain sera d’environ 3,9% du PIB pour l’exercice budgétaire 2013, qui se termine le 30 septembre, et il tombera à 2% en 2015, contre 7% en 2012 et 10% en 2009. Mais il remontera à 6,4% en 2038, selon le CBO.

La dette de l’Etat fédéral dite “détenue par le public”, 73% du PIB en 2013, descendrait à 68% en 2018 avant de remonter à 100% d’ici 2038, à moins de réformes des programmes de retraite publique (Social Security) et de santé.

Paul Ryan: Obamacare “est une grave erreur”

Cet indicateur de dette publique (somme des déficits annuels) est calculé différemment de celui de la dette publique souvent utilisé par les économistes, car il n’inclut pas les dettes internes de l’Etat fédéral. Le Fonds monétaire international (FMI) estimait en avril que la dette publique américaine totale atteindrait 108% du PIB en 2013.

Les nouveaux chiffres publiés mardi devraient alimenter le débat au Congrès sur le budget. La Chambre des représentants, contrôlée par les républicains, et le Sénat, à majorité démocrate, s’opposent depuis des années sur une éventuelle réforme structurelle du budget, les républicains exigeant une réduction draconienne des dépenses sociales (santé, retraite) tandis que les démocrates envisagent de nouvelles hausses d’impôts visant les plus aisés.

Le mois d’octobre verra aussi le début de l’entrée en vigueur de la réforme de la santé de Barack Obama, votée en 2010, et dont le volet majeur rendant obligatoire la souscription à une couverture santé débutera en 2014.

A partir du 1er octobre, des millions d’Américains non assurés pourront s’inscrire sur un site internet et souscrire à une couverture maladie, plus ou moins subventionnée en fonction de leurs revenus.

Le CBO estime que 55 millions de personnes sont concernées, et que 7 millions pourraient profiter de la réforme dès 2014.

Mais les républicains honnissent la nouvelle loi et conditionnent tout compromis sur le budget de l’exercice 2014, qui commence le 1er octobre, à une clause supprimant les financements d'”Obamacare”, le surnom donné à la réforme.

“Le rapport répète une évidence: les dépenses publiques, surtout pour la santé, aggravent notre dette”, a réagi Paul Ryan, président républicain de la commission du Budget de la Chambre. “Et +Obamacare+ ne résoudra pas le problème. Cette loi est une grave erreur. Nous devons donc la remplacer par une réforme réelle et consensuelle”.